Artiste : Craig McDean - source facebook
Les morts-vivants sont partout : Ils ont contaminé et, fatalement, infecté toute la surface de la planète.
Comment Elenya Editions aurait-elle pu échapper à cette invasion ?
Pour son troisième concours d'écriture, la maison d'édition a sélectionné douze auteurs. Douze chasseurs de zombies ayant mené une battue sans merci contre ces horribles créatures assoiffées de chair.
Découvrez l'encre noire de ces lauréats et en bonus, quatre nouvelles écrites par un jury qui se sera fait piéger et aura dû mettre le pied à l'étrier lui-aussi.
Les morts-vivants auront-ils pris le dessus ?
Extrait 1 tiré de la nouvelle "Le carrefour du Diable" de Olivier Masson :
Après plusieurs dizaines de minutes de marche, j’eus la désagréable sensation d’être observé. Soudain, une masse sombre se jeta sur moi dans un croassement assourdissant. Je posai un genou à terre devant la violence de l’attaque et croisai les bras devant mon visage tandis que l’animal, dans un furieux battement d’ailes, enfonçait ses serres dans ma chair et me harcelait de coups de bec rageurs. Je me roulai par terre pour échapper à ses griffes, mais l’oiseau ne cessa ses assauts. Il me lacéra le dos avec une sauvagerie inouïe, rendu fou par la vue du sang qui dégoulinait de mes nombreuses plaies. Plus je me débattais, plus l’animal maudit se déchaînait. Dans ce ballet grotesque de plumes et de sang, je portai ma main à ma ceinture, saisis mon mousqueton, puis tirai en l’air. Le noir volatile lâcha enfin prise, s’éleva, décrivit un arc de cercle autour de ma tête, puis plongea dans les profondeurs de la forêt dans un croassement de dépit.
À bout de souffle, je le regardai disparaître dans le lointain. Je me relevai et balayai les environs du regard. Ma lutte avec l’oiseau infernal m’avait mené au beau milieu d’un carrefour macabre. En son centre se dressait un chêne immense et menaçant qui faisait glisser ses sombres racines sinueuses sur le sol. Sous sa plus grosse branche, une cage de fer se balançait au gré du vent, émettant un désagréable grincement métallique. À l’intérieur, le spectacle était des plus atroces. Des dizaines de corbeaux, dont certains de la taille d’un gros chat, se disputaient les restes d’un cadavre, échangeant force coups de becs pour un morceau de joue ou pour l’un des derniers orteils du défunt. Un hideux suaire de mouche recouvrait le corps du malheureux. Dans un ultime geste de désespoir, celui-ci lançait un bras décharné hors de sa prison de fer.
Extrait 2 tiré de la nouvelle " Les nouveaux cafards" de John Steelwood :
Au premier coup porté, je perçus une force indescriptible m’envahir. J’atteignis l’un des morts-vivants au sommet du crâne, ce dernier se découpa net, comme l’aurait été une meule de beurre dans pareil combat. Le cuir chevelu s’écrasa sur un boitier DVD de la série Friends. Intérieurement, je ris, j’imagine la tête de Monica si elle devait nettoyer ça, puis je repoussai le corps inerte d’un coup de pied. Il s’affala sur l’autre zombie qui mastiquait la langue de la femme, la langue des mercis, et sans attendre une réaction de sa part, j’enfonçai l’une des extrémités de la barre dans l’oeil du mort. Son cerveau cessa aussitôt toute activité.
La porte était restée grande ouverte. J’entendais des gémissements se rapprocher, des marcheurs. Ils erraient sur le bitume, et traînaient les pieds, et raclaient les semelles de leurs chaussures. Sans attendre, je verrouillai la porte, il n’était plus question de partir par ici. Une horde de zombies passa devant la maison, certains caressèrent du bout de leurs ongles décatis la vitre recouverte de sang, d’autres la léchèrent avec avidité. Je soufflai. Quant à prier, ce n’était plus la peine. Dieu était mort avec l’arrivée de ce Fléau. Je touchai du bout des doigts la croix qui pendait à ma chaîne, je ne ressentais plus rien. Elle n’était plus qu’un bout de métal sans valeur. Je l’arrachai.
Extrait 3 tiré de la nouvelle "Le réveil" de LA MANNA
La lumière frappait ses yeux tel un charbon ardent sur une plaie ouverte. La bouche sèche et les membres atrophiés empêchaient Dave Tremblay de se mouvoir librement. Tout était pénible et la confusion de ne rien reconnaître augmentait l’angoisse d’un niveau. Deuil d’une mémoire déficiente, il ne pouvait lier ce qu’il voyait avec ce qu’il aurait dû voir, bref tout lui était inconnu. Avec un effort surhumain, il réussit à lever son bras et quelle ne fut pas sa surprise de voir l’état de sa main. Celle qui jadis était dans les standards de l’élégance se voyait maintenant envahie par des rides et une peau quasi transparente. L’usure du temps avait fait son apparition sans
qu’il en comprenne la raison. Confusion à son comble, il commençait à deviner dans quel lieu il avait repris conscience.
Un hôpital, mais que faisait-il ici ? Depuis combien de temps y était-il ? Pire... Qui était-il ? Parcelle de mémoire sous la coiffe d’une déduction, il réussit avec peine à lire les petits caractères du bracelet noué à son chétif poignet. Dave Tremblay,TREMD07486212, 15/02/68. Ce devait être son nom et sa date d’anniversaire ainsi que son numéro d’assurance maladie. Dave Tremblay, Dave Tremblay. Il répétait intérieurement son nom tel un mantra aux vertus salvatrices. Tout était si flou et sa gorge ne faisait que lui réclamer à boire. Le feu lui brûlait la bouche tout comme les lèvres en soif de réponses absentes de sa mémoire.
Mon avis :
Plonger dans zombies à l'occasion d'Halloween, fut un véritable régal pour moi et choisir quelques extraits dans ce recueil fut très difficile, car toutes les nouvelles sont plus étonnantes les unes que les autres.
Zombies sous la plume et l'encre d'auteurs aussi talentueux nous permet de découvrir un monde chaotique, une vision souvent effrayante, parfois redoutable menant le lecteur à une certaine réflexion sur notre humanité.
Croiser la route des morts-vivants est ici unique en son genre. Tour à tour, zombie souffrant de la faim qui tenaille et fait avancer malgré le dégoût.... Rester en vie en gardant un semblant d'humanité... ou pas... Se réveiller des années plus tard et découvrir un nouveau monde où les zombies ne sont pas ceux auxquels on s'attend, attendre patiemment d'être délivré au carrefour du Diable, des expériences qui tournent mal, bref un éventail de mots à déguster, que dis-je à dévorer jusqu'à la dernière page.
Au menu :
Matriochki de Christophe Gallo
Pour une goutte d'eau de Monia Sommer
La Condition de Marion Gallant
Par-delà la mort de Carine Roucan et Pierre Dupuis (jurés)
Le rêve étrange du Professeur Waldmann de Laurent Femenias
L'impasse de Caroline Thomas
Le réveil de La Manna
Le carrefour du Diable de Olivier Masson
L'amour ne meurt jamais de Rémy Garcia (jurés)
Immolés de Maxence Miallot
Chaos de Leïla Rogon (jurée)
Les nouveaux cafards de John Steelwood
Les autres vies de Christophe Valat
Pantins de Yoann Legave
A quoi bon l'eternité de Jean-Christophe Perriau
La marche du commandeur de Lanto Onirina (jurée)
A noter : Le recueil contient cinq très belles illustrations de Jimmy ROGON ainsi que l'illustration de couverture.
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